Le 7 janvier 2015, aux alentours de midi, je me souviens avoir posté quelque chose sur la page Facebook du blog à propos des soldes et de mes boots léopard. Je me souviens aussi de mon état de stress, insupportable depuis quelques jours, et de mon énervement aussi, à cause d'un litige sur Ebay.
Puis je suis allée sur Twitter, où un titre de presse indiquait sobrement qu'il y avait eu une fusillade dans les locaux de Charlie Hebdo. Je me rappelle avoir prévenu mon père, qui lui-même a allumé la télévision pour se brancher sur les chaînes d'infos en continu. BFM n'en parlait pas encore mais iTélé avait tout interrompu pour se consacrer à l'évènement. Et les chiffres alarmants qu'ils annonçaient tournaient en boucle : au moins dix morts et cinq blessés.
Une heure plus tard, le compte était plus tragique : douze morts, dont cinq caricaturistes, deux policiers, un correcteur, deux chroniqueurs, un invité de la rédaction et un agent d'entretien. Je me rappelle avoir eu envie de fondre en larmes, d'annuler un rendez-vous que j'avais dans l'après-midi à l'autre bout de Paris parce que j'avais l'impression que mes jambes ne réussiraient pas à m'y porter. La peur aussi, de savoir que ces fous étaient toujours dans la nature, de savoir que mon copain emprunte plusieurs fois par jour le boulevard sur lequel un policier a été tué à bout portant. La gerbe, en tombant sur Facebook sur la vidéo de cette exécution, si ridicule avec ces slogans scandés comme des ados un peu débiles, si lâche envers un homme blessé et à terre. Je me rappelle être restée figée devant mon écran, terrifiée par le son des balles tirées par les armes de guerre de ces fous furieux.
Bien sûr, cette tuerie me touche d'autant plus que les victimes étaient entre autres journalistes, mais je n'ai pas cessé de penser aux douze familles touchées hier. A la famille de ce policier abattu aussi, sûrement horrifiée du nombre de partages de la vidéo dont je vous parlais plus haut (il faut du pain et des jeux, parait-il). Mais les messages et dessins de soutien étaient si beaux et si tristes à la fois. Ils ont été un refuge en quelque sorte, le soulagement de voir qu'on était des millions dans le monde, bouleversés par cette atteinte à la liberté d'expression, à la liberté de la presse, à la laïcité. Et à notre pays et ses habitants, dont une partie risque d'être stigmatisée à cause d'une poignée d’extrémistes.
Dans la soirée, tandis que des milliers de personnes s'étaient rendus Place de la République pour témoigner de leur tristesse et de leur soutien, certains esprits se sont échauffés. Certains proposant qu'on perpétue des attentats nous aussi, chez les terroristes, à croire que les Arabes, même Français, viennent toujours d'ailleurs. Certains souhaitant le retour de la peine de mort, comme cette grande blonde dont on entendu trop parler à mon goût, à qui tant de Français ont montré leur soutien aux dernières municipales. J'ai d'ores et déjà la nausée en pensant aux élections présidentielles de 2017.
Je terminerais par cet hommage de Zep, drôle et affectueux, et n'oublions surtout pas qu'ils étaient douze.
