Jade from Paris: Fruitvale Station, fait divers en crescendo

dimanche 5 janvier 2014

Fruitvale Station, fait divers en crescendo

fruitvale station ryan coogler


Le 1er janvier est sorti dans les salles La Vie Rêvée de Walter Mitty mais aussi un film tiré d'un fait divers, Fruitvale Station de Ryan Coogler, produit par l'acteur Forest Whitaker. Une sortie ciné qui résonne comme un hommage à Oscar Grant, Afro-américain de 22 ans dont il est question dans le film, décédé le 1er janvier 2009 à la station de métro Fruitvale dans la banlieue de San Francisco après un réveillon en ville. Une mort absurde et choquante, qui a provoqué manifestations et émeutes dans la ville. Le tireur ? Un agent de police qui déclarera à son procès avoir confondu son arme à feu avec son taser. Seul hic : Oscar Grant était menotté et allongé sur le ventre à ce moment-là, sans besoin d'être immobilisé plus encore. Et comme la loi est bien faite, ce policier n'écopera que de deux ans de prison pour homicide involontaire avant d'être libéré en conditionnelle huit mois plus tard. 


fruitvale station michael b jordan
Copyright photo : ARP Sélection


Un fait divers marquant pour le réalisateur Ryan Coogler, qui décide de raconter cette histoire en se démarquant bien du blabla politique qui a suivi les évènements. Et surtout, il tente de ne pas déshumaniser les évènements. Le film raconte les dernières vingt-quatre heures de la vie d'Oscar Grant jusqu'au tir de Johannes Mesherles. Du coup, une bonne partie du début du film est assez peu intéressante, il faut l'avouer, mais c'est là tout le parti pris du film : montrer que Grant était un jeune comme il y en a tant, qui n'imaginait sûrement pas ce qui allait lui arriver ce soir-là. Et qui comptait énormément pour ses proches, quels que soient ses défauts. Durant ses dernières heures, il aide un chien écrasé par une voiture par exemple ou achète du crabe pour le dîner du réveillon. Autant de détails apparemment fidèles à la réalité.
Et le point appréciable, c'est que, même si le film montre l'absurdité et l'injustice de son décès, il ne transforme pas non plus la victime en héros. Oscar Grant était un branleur notoire (il faut dire ce qui est), ayant déjà fait de la prison pour trafic de drogues, continuant à dealer de temps en temps, trompant sa copine de temps en temps aussi, mentant sur le boulot qu'il n'a plus...  Ironie du sort : il avait décidé de marcher droit ce 31 décembre 2008.

fruitvale station octavia spencer
Copyright photo : ARP Sélection


Si on baille un peu durant les premières 60 minutes, le crescendo final est violent et j'ai personnellement beaucoup appréhendé le moment de la mort d 'Oscar Grant. Le pire ? Cet extrait arrive très rapidement, comme si de rien n'était. Une vie brisée en l'espace d'une seconde par un policier, montré humain lui aussi, dépassé par les évènements et le comportement insolent et anti-flic de la victime (d'où les nombreux débats politisés survenus par la suite). Un final d'une vingtaine de minutes qui fait que je ne regrette pas de m'être un peu ennuyée au début. Avec en plus des images tournées au téléphone portable sur les lieux en début et fin du film : les premières, facilement trouvables sur le net, montrent la mort abrupte d'Oscar Grant sur le quai de la station Fruitvale ; les secondes sa petite fille métisse prostrée, près de pancartes dénonçant le meurtre de son père. Ca a le mérite de replacer le film dans son contexte et d'humaniser un peu plus les faits.

fruitvale station melonie diaz
Copyright photo : ARP Sélection


A voir parce que c'est un beau film, qui montre la personnalité des protagonistes mêlés à un fait divers plutôt que l'évènement lui-même, quitte à faire fi des rebondissements et autres cliffhangers. Le tout est servi par une super casting : Michael B. Jordan dans la rôle principal (Chronicle, The Wire), Octavia Spencer (La Couleur des Sentiments, Snowpiercer) ou encore Melonie Diaz (Be kind, rewind).
Le film a entre autres reçus le Prix du Public et le Prix du Grand Jury à Sundance, ainsi que le Prix du Public et le Prix de la Révélation Cartier au Festival du Cinéma Américain de Deauville. Rien que ça.
Je vous laisse avec la bande-annonce :



Et vous, avez-vous vu ou comptez-vous voir Fruitvale Station ? Aviez-vous entendu parler de ce fait divers ?