Jade from Paris: L'Allemagne nazie vue de l'intérieur

lundi 14 avril 2008

L'Allemagne nazie vue de l'intérieur


Cela faisait longtemps que je n'avais pas écrit d'article sur le thème de la littérature, et pour cause! Lire un roman d'environ 900 pages ne se fait pas en quelques jours seulement: je veux vous parler des Bienveillantes de Jonathan Littell, prix Goncourt 2006. Après avoir dévoré Maus, j'ai pensé que comparer deux points de vue différents sur l'Allemagne d'Hitler serait très intéressant (bien que, dans les Bienveillantes, le narrateur n'ait jamais existé), et en choisissant ce livre, je ne me suis vraiment pas trompée. C'est sincèrement le meilleur ouvrage que j'ai pu lire cette année, poignant, touchant, horriblement historique et affolant. J'admets qu'il est vraiment très long, qu'il est parfois très difficile à lire et à suivre, que les faits racontés tout au long des 893 pages sont difficiles à digérer, et surtout à accepter. Mais le fait que l'auteur, de religion juive, se soit attaqué au thème des massacres commis par les Allemands pendant la Seconde Guerre Mondiale, rend le récit encore plus universel, plus intéressant, d'autant plus qu'il tente d'expliquer pourquoi et comment tout cela a pu arriver. Les faits nous sont narrés à travers les yeux du narrateur, Max Aue, ancien officier-SS durant la guerre 39-45: on le suit depuis l'invasion de la Pologne à la capitulation allemande (ou presque), en passant par la Russie, la France ou l'Ukraine; les principales aktions nazies sont expliquées et illustrées, aussi horribles soit-elle à lire et à imaginer. Et à côté de cette langue crue, choquante, l'auteur a su mêler Histoire, géographie, littérature ou philosophie: une oeuvre de maître, surtout pour un premier roman! Mais j'ai surtout été scotchée par le ton ironique qu'il a emprûnté, appuyant surtout le fait que beaucoup des membres du NSDAP n'avaient vraiment rien d'aryen (c'est le cas de le dire), sans pour autant traiter leurs semblables tel qu'ils se considéraient eux-mêmes: le narrateur aime sa soeur incestueusement, il refoule son homosexualité mais continue d'avoir des relations sexuelles avec des hommes, Adolf Hitler avait, de profil, un nez étrangement semblable à celui d'un Tsigane...etc, et pourtant tous les autres étaient éliminés... Bref, le tout regorge de scènes de beuveries, de sexe malsain et de déféquation (et autres petites contrariétés) pour bien ancrer le récit dans une ambiance, obscène comme il faut. Alors si vous voulez vous régaler devant un superbe roman historique pas ennuyeux pour deux sous, avec un vrai fond, courez l'emprûnter à la bibliothèque (bah oui, sinon c'est 12€ en poche) et vous m'en direz des nouvelles (mais âmes sensibles, s'abstenir malheureusement).