
...Ou plutôt une autofiction, car comme le dit Bret Easton Ellis sur la quatrième de couverture "c'est au lecteur de décider ce qui, dans
Lunar Park, a bien eu lieu." L'auteur nous fait partager son quotidien qui est plutôt agité. Une vie familiale chaotique, entre un mariage raté avec l'actrice Jayne Dennis, un fils renfermé et peu expressif et une fille qui n'est même pas de lui; le tout drogué aux antidépresseurs, tant à la mode dans le monde du show-biz. Sa vie professionelle, elle, n'est que plus malheureuse: après avoir écumé d'interminables fêtes, testé de nombreuses substances illicites et connu d'innombrables conquêtes aussi bien féminines que masculines, il peine à retrouver un cours de vie dit "normal", souffrant de penchants toxicomanes et alcooliques mais aussi d'hallucinations liées à ses précédents romans et à son imagination sans cesse sollicitée. Ainsi apparaissent des esprits, des manifestations étranges dans sa résidence banlieusarde chic, des petits garçons disparaissent les uns après les autres, les meubles de la maison se déplacent sans que personne s'en rende compte et surtout, le fantôme de Patrick Bateman -"héros" d'
American Psycho- qui ne cesse de se manifester. Un univers parfois angoissant avec un Bret Easton Ellis impuissant et désorienté qui mène cependant vers un sujet plus personnel: sa relation tumultueuse avec son père. D'où une fin extrêment touchante -j'en ai même eu la larme à l'oeil- qui par le biais de l'image d'un père et de son fils fait écho à une vraie tourmente que ressent l'auteur vis-à-vis de son propre géniteur.
Lunar Park est donc une roman qui mêle éléments véridiques et fiction au point d'embrouiller ses lecteurs et qui n'oublie pas de dresser un portrait critique d'une partie de la société, riche, parente mais désemparée par son quotidien trop aseptisé et les attentats du 11 septembre 2001.
J'ai beaucoup aimé ce livre, il change vraiment de l'écriture crue et violente d'
American Psycho même si parfois ce "franc-parler" reprend; cependant, l'histoire est parfois difficile à suivre étant données les doses illicites que consomme le narrateur: mieux vaut arrêter sa lecture à chaque fin de chapitre, bien que les évènements soient très intéressants et captivants. Le roman a même été élu meilleur livre de l'année 2006 par le magazine littéraire
Lire! En se créant une autre vie dans
Lunar Park, Bret Easton Ellis continue donc son travail de moraliste et critique de la
upper class américaine, et dévoile également des côtés plus personnels de sa vraie vie, si du moins vous parvenez déjà à découvrir quels éléments sont les bons... :)
Pour vous aider, le
site officiel du roman qui fait la part des choses, ou presque...
Photo: Bret Easton Ellis lui-même